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18.09.2021
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Naomi Parry: "Amy Winehouse était l'ambassadrice des non-conformistes"

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AFP-Relaxnews
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18.09.2021

 Icône soul, icône rebelle, icône du style… Amy Winehouse a inspiré toute une génération non seulement dans le domaine de la musique mais aussi dans l'univers de la mode. Dix ans après son décès brutal, l'ouvrage "Amy Winehouse - Flash Black" lui rend un vibrant hommage via les témoignages de nombreux de ses proches, des images d'archives inédites, ou encore des décors reconstitués avec certains de ses objets préférés, sous la direction de sa styliste et amie Naomi Parry. Rencontre avec celle qui a le mieux connu la garde-robe de la chanteuse britannique, décryptant son style unique, de ses influences à ses pièces fétiches.


DR


ETX: Pouvez-vous nous parler de votre rencontre, peu commune, avec Amy Winehouse?

Naomi Parry:
C'était au cours de l'été 2005, et un ami de l'école, Jon, m'avait emmenée déjeuner à Soho. Nous avions 19 ans à l'époque et nous étions entre nos cours d'Art & Design Foundations et notre Bachelor of Arts au London College of Fashion. Nous nous sommes retrouvés au Freedom Bar, qui était un bar gay populaire que nous fréquentions souvent. En face de nous, nous avons repéré un très bel homme qui prenait un verre avec une fille à la beauté tout aussi saisissante. Après mûre réflexion, mon ami Jon leur a fait servir deux Martini qui nous semblaient être des boissons sophistiquées. Ils ont déboulé avec un grand sourire en disant qu'ils avaient d'abord pensé que nous nous moquions d'eux et qu'ils étaient sur le point de venir pour 'en découdre'. Nous avons noué des liens en parlant cheveux volumineux, mais aussi de l'absence de cheveux de Jon, puis nous avons passé le reste de la soirée à trainer dans Soho jusqu'au petit matin. Je suppose que nous devions être des âmes sœurs car nous sommes tous devenus inséparables depuis ce jour.

ETX: Vous attendiez-vous à ce moment-là à devenir un jour sa styliste personnelle ?

NM: L'idée ne m'a même pas traversé l'esprit. Le monde professionnel d'Amy semblait si éloigné du mien, celui d'une styliste en herbe assistante sur des shootings éditoriaux. Je me souviens qu'Amy disait qu'elle aimait ma façon de m'habiller, elle me complimentait toujours quand je la voyais. Je suppose que je m'habillais légèrement différemment de beaucoup de gens à Camden. Pas d'une manière excentrique, mais je ne correspondais pas vraiment à l'une des sous-cultures qui y résidaient - punk, gothique, hippie, rockabilly. Je n'ai toujours pas de tatouage, chose qu'une fan d'Amy a eu une fois beaucoup de mal à comprendre. 'Comment pourrais-je travailler avec quelqu'un qui a des tatouages alors que moi-même je n'en avais pas ?!' En fait, Amy m'a demandé de travailler avec elle par l'intermédiaire de mon petit ami de l'époque, qu'elle connaissait avant même que je ne la rencontre. J'étais en train de travailler en tant qu'assistante, et lorsqu'il m'a appelée pour savoir si j'étais intéressée, c'était assez surréaliste au point que j'ai d'abord pensé à une blague. Mais le lendemain, fidèle à sa parole, son manager m'a appelée, avec méfiance, pour me demander si j'étais vraiment styliste ou si j'étais juste une de ses 'potes de Camden' - un peu des deux en fait. L'instant d'après, je passais un entretien au siège d'Island Records et mon premier travail était pour une émission appelée 'Lorraine', qui a bercé mon enfance. C'était assez fou.

ETX: Dans le livre, vous parlez des influences de Camden Town sur le look iconique d'Amy Winehouse. En quoi ce quartier de Londres l'a-t-il inspirée?

NM: D'après ce que je sais, Amy a déménagé à Camden en 2003, juste avant la sortie de son premier album "Frank". Pendant la promotion de cet album, son style était encore assez peu influencé par son nouvel environnement. Camden était cet endroit incroyable où plusieurs sous-cultures différentes existaient mais se mélangeaient toutes dans les pubs locaux, en particulier The Good Mixer. Le lieu avait un véritable état d'esprit et tournait le dos aux tendances, et je pense qu'Amy s'y sentait comme chez elle. Tant sur le plan de la musique que celui du style, elle a été fortement influencée par les années 60, mais il y avait aussi des éléments punk, dont ses ourlets bruts et ses bretelles de soutien-gorge, sur scène, du rockabilly avec ses tatouages et sa taille de guêpe, et de l'indie/ska avec ses polos et ses baskets Reebok. Le tout fait à sa façon, unique, et accessoirisé de boucles d'oreilles habituellement portées par des rappeuses. C'était un beau mélange de tous les genres que l'on pouvait trouver à Camden et je pense que c'est ce qui a fait d'elle l'ambassadrice des non-conformistes.

ETX: Amy Winehouse est connue pour son style punk, pin-up rebelle, alors qu'on découvre dans le livre des looks beaucoup plus classiques juste avant votre rencontre en 2004. Quel rôle avez-vous joué au fil des années?

NM: En tant que styliste, je pense qu'il est important de travailler en étroite collaboration avec le client pour qu'il y ait une certaine authenticité. Amy avait ce sens très fort de l'identité et même si, le plus souvent, sa tenue de référence était constituée d'une paire de shorts en jean et d'un polo, elle voulait se sentir un peu plus soignée sur scène, en particulier pour les grands événements. Comme je connaissais Amy, un brief n'était pas vraiment nécessaire et cela m'a permis d'adopter une approche plus novatrice, et de mettre en valeur son look en ajoutant des coupes et des couleurs plus contemporaines pour l'associer au regard plus rétrospectif qu'elle avait cultivé. La résonance de 'Back to Black' était définitivement plus contemporaine et nous voulions créer un look en harmonie.

ETX: Son look ne correspondait pas vraiment aux codes de la mode de l'époque. Etait-il difficile de faire en sorte que les plus grandes maisons l'habillent?

NM: Au début, c'était assez difficile, oui. D'autant plus que j'étais une jeune styliste et que je n'avais pas encore établi un rapport suffisant avec les agences de relations publiques pour obtenir certaines faveurs. Cependant, j'avais quelques amis dans l'industrie qui m'ont prêté les premières pièces de créateurs, et je leur en serai éternellement reconnaissante. Mais la musique d'Amy parlait d'elle-même et lorsqu'elle est devenue plus populaire, au lieu d'e-mails ignorés et de refus polis, les créateurs ont commencé à lui envoyer des cadeaux dans l'espoir qu'elle les porterait. Toutefois, son look était si particulier, même si ce n'était pas évident, que la plupart de ces vêtements ont rarement été utilisés - elle n'était pas du tout influencée par le prestige de la marque ou le coût du vêtement.

ETX: Vous écrivez qu'elle aimait mixer la mode haut de gamme avec des trouvailles de la rue. C'est très actuel ce mélange des genres. Le monde de la mode était très divisé à l'égard de son style, mais n'était-elle finalement pas avant-gardiste?

NM: Ce qui a contribué à rendre son style iconique, c'est vraiment son attitude. Et je pense que c'est quelque chose qui est universel chez les icônes du style. Elles n'en ont vraiment rien à faire, et portent ce qu'elles veulent et, du coup, ça marche. Mais cette attitude est authentique, naturelle - elles ne suivent pas les tendances et restent fidèles à leur look, peu importe ce que les magazines de mode leur conseillent de porter. C'est audacieux et admirable, mais peut-être est-ce aussi une sorte de protection ?

ETX: Elle rejetait aussi toutes formes de diktats, d'où son style 'trash'. Qu'aurait-elle pensé du body positive, du genderless, du mélange des cultures dans la mode?

NM: Je ne sais vraiment pas ce qu'elle aurait pensé du mouvement body positive. Elle a toujours été très ouverte et positive vis-à-vis de la taille et de la silhouette de chacun, mais malheureusement pas de la sienne. Cependant, je pense que le changement d'attitude de la presse, qui est un peu moins focalisée sur le corps des gens, l'aurait certainement aidée et cela aurait été très important. Elle portait une robe en 2004 aux Mercury Music Prize Awards et une partie de la presse l'a qualifiée de 'potelée', ce qui, pour une jeune fille de 20 ans, doit être incroyablement préjudiciable. Cela ne se produirait pas aujourd'hui, car les médias sociaux auraient déclenché un tollé, à juste titre.

ETX: Si vous deviez choisir un seul look porté par Amy Winehouse, lequel choisiriez-vous?

NM: J'en ai deux en réalité. Le premier est la tenue qu'elle portait sur le tapis rouge des Brit Awards en 2007, parce que j'ai vraiment l'impression que c'était le moment où Amy avait trouvé son style et que tout ce qu'il se passait ce soir-là était tellement important qu'on sentait qu'elle y était arrivée, qu'elle avait enfin réussi. L'autre est le look du clip 'Tears Dry on Their Own' réalisé par David LaChapelle. J'adore ce look. A la base, c'était celui que je préférais le moins à cause de sa coupe - le débordement de la robe sur la ceinture me rendait folle. Cependant, Amy l'a adoré et l'a porté à d'autres reprises en public, ce qui, je pense, était très avant-gardiste de sa part, étant donné la culture de la fast-fashion et du jetable que nous devons désespérément abandonner. Mais en réalité, il y a tellement de fois où Amy était incroyable et, à cause de la multitude de clichés pris par les paparazzis où elle n'était pas bien, on ne se rend pas vraiment compte de la quantité de belles photos qui existent. Heureusement, le livre en regorge - il la montre sous son meilleur jour et c'est ainsi que l'on devrait se souvenir d'elle.

(ETX Daily Up)
 

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