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18.02.2004
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Mod’Art exporte son savoir faire

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18.02.2004

Monsieur de Place, pourriez-vous nous présenter Mod’Art International ? Cette école a été créée en 1984, elle fête ses 20 ans cette année. A l’origine, elle était spécialisée dans le chapeau. Beaucoup de nos anciens élèves sont aujourd’hui des spécialistes dans ce domaine. Nous continuons bien sûr cette activité mais, il y a 2 ans, lorsque nous avons repris l'école qui s’appelait CMT, nous avons complètement réorganisé les programmes. Quelles sont les formations proposées ? L'école offre aux étudiants deux carrières complètement différentes. Il y a d’abord une formation de création de mode en stylisme modélisme relativement classique même si notre méthode d’enseignement l’est moins. Puis, une formation nouvelle, moins répandue en France, qui est le management de la mode. Pourquoi avez vous ressenti le besoin de former des étudiants au management de la mode? Parce qu’aujourd’hui la mode est devenue une industrie adulte, très importante qui a ses propres règles, son langage et ses normes. Si l’on veut travailler dans ce métier, il est préférable d’avoir suivi une formation spécialisée. Concrètement, comment se passe cette formation? Les étudiants en management de la mode étudient d’abord trois ans en France. Ensuite, s’ils réussissent, ils vont étudier une année en Angleterre. Nous avons passé des accords avec des universités britanniques qui permettent aux étudiants d’obtenir un Bachelor Degree anglais, ce qui est très important aujourd’hui. Avoir dans son CV un diplôme d’état anglo-saxon est extrêmement valorisant. Je pense que, dans la mode, le biculturalisme est essentiel. Aujourd’hui, en France, de nombreuses maisons de couture utilisent des designers de formation anglaise. La complémentarité des deux cultures est très positive. Si les étudiants ont l’opportunité de faire trois ans en France et un an en Angleterre, ils sortent avec un esprit totalement ouvert aux différentes façon de faire, à la manière dont les Anglais approchent les choses qui est complémentaire de la nôtre. Quelles sont les universités dans lesquelles vous envoyez vos étudiants ? Nous avons la chance d’avoir passé des accords avec des universités prestigieuses comme le London College of Fashion qui est l’équivalent pour le management de la Saint Martin's School, très connue dans le stylisme. Il y a une autre université qui a une fantastique réputation dans le domaine de la mode qui est Nottingham Trent University et une troisième, très connue, à côté de Manchester qui s’appelle Huddersfield University. A quel âge entre-t-on dans votre école ? Il y a deux cas de figure. Après le baccalauréat, les étudiants entrent grâce à un entretien d'admission composé d'un dossier, CV, lettre de motivation,... révélant leur personnalité. Ils passent trois ans en France et une quatrième année en Angleterre. Les candidats justifiant d'une formation préalable de préférence en commerce/management d'un minimum bac + 2, peuvent entrer directement dans une sorte de troisième année qu’on appelle le BA, le programme Bachelor (Hons) Fashion Management. Ils suivent alors une formation très intensive d'un an en France où on les familiarise avec la mode puis, ils étudient un an en Angleterre. Cela fait donc deux ans de cursus au lieu de quatre pour ceux qui ont déjà un Deug universitaire, BTS ou DUT reconnu dans n’importe quelle discipline. J’aime cette ouverture et le métissage dans ce domaine. On peut très bien avoir fait un Deug de chimie et être passionné par la mode. Nous ne segmentons pas du tout et internationalisons le plus possible puisque, mis à part l’Angleterre, nous avons ouvert assez rapidement des écoles Mod’Art dans plusieurs villes comme à Shanghai. Pourquoi Shanghai ? Aujourd’hui, la Chine est incontournable. Nous avons énormément d’étudiants chinois dans notre école à Paris. Nous avons passé un accord avec l’université de Shanghai : les cours y sont donnés sur le campus. Croyez-vous en la capacité créatrice des designers chinois ?
Défilé de l'école à l'occasion du nouvel an chinois
Bien sûr. Il n'y a pas encore aujourd’hui de designers chinois connus sur le plan international. Mais c’est un peuple qui, depuis 5000 ans, nous a prouvé qu’il avait des capacités artistiques extraordinaires. La culture chinoise est l'une des plus importante du monde. Il est donc évident que, dans les années à venir, grâce à l’influence de l’Occident, les voyages et les lectures de magazines étrangers, nous allons assister à une floraison de designers chinois de très haut niveau. Regardez dans le domaine du cinéma ce qu'ils font depuis une dizaine d’années. Ils vont prendre une place primordiale dans tous les arts. C’est évident. Quelque chose de très intéressant va se dessiner dans les années à venir mais il faut leur donner le temps. Vous intéressez-vous également à d’autres pays ? Le 5 avril, nous ouvrons une école à Buenos Aires. Cette ville de 13 millions d’habitants est le foyer culturel de toute l’Amérique Latine. Les argentins sont très sensibles aux métiers artistiques. Beaucoup de designers argentins sont très talentueux même si, à cause de la crise, ils n’ont pas toujours la possibilité de s’exprimer. Le fait d’ouvrir une école française à Buenos Aires est un tremplin pour l’Amérique latine en général. La crise ne vous a t-elle pas empêché de mener à bien votre projet ? Non, au contraire. Elle nous a aidé dans la mesure où elle a révélé un certain nombre d’éléments, notamment que tout le secteur textile avait été laminé par le fait que le peso argentin avait été fixé au même cours que le dollar. Les produits étaient importés et l’industrie textile locale est tombée en léthargie. Aujourd’hui le peso est revenu à une parité plus normale et toutes les industries textiles sont en train de revivre. Au contraire, nous arrivons à point, au moment où le pays est en train de se réveiller. Y a t-il un concours pour entrer dans votre école ? Non, car un concours ne veut pas dire grand chose. Il y a un très long entretien qui permet de déterminer la motivation de l’étudiant, s’il a une attirance profonde, un véritable goût pour les métiers de la mode et si sa personnalité correspond à la philosophie d’enseignement de l’école. La sélection est-elle sévère ? La sélection est sévère pour la simple raison que beaucoup de jeunes veulent travailler dans la mode que ce soit dans le stylisme ou le management. Il y a beaucoup de candidats et nous ne voulons pas dépasser une quantité maximum de 35 étudiants par promotion. Par conséquent, nous sommes obligés d’être sélectifs. Nous préférons la qualité à la quantité. De plus, les universités anglaises étant extrêmement sévères dans leur sélection, nous ne pouvons pas nous permettre de maintenir dans l’école des étudiants qui ne seraient pas au niveau. Ceci dit, jusqu’à présent, le niveau de nos étudiants est excellent. Quelle est la place des stages en entreprise ? Elle est très importante. Ce qui nous différencie des autres écoles, est que la majorité de nos professeurs sont des praticiens qui travaillent dans des entreprises de mode. Ils sont tous les jours face à la réalité du terrain. Notre enseignement est donc axé sur la pratique. Il très peu académique et théorique. Les stages en entreprise sont obligatoires et nombreux. Ils sont l’un des critères majeurs de l’appréciation du travail des étudiants. Est-ce que vos étudiants poursuivent un projet professionnel au cours de leur formation ? Bien sûr. Ils travaillent pour une entreprise de mode et font un mémoire dessus. En Angleterre, ils font ce que les anglais appellent une « dissertation », qui porte également sur un sujet pratique. Quel est le coût moyen des formations ? Y a t-il un système de bourse pour les étudiants qui ne pourraient pas s’offrir cette école ? Une année coûte, pour les étudiants de l’Union Européenne, entre 5000 et 6000 euros par an. Nous n’avons malheureusement pas de bourse. En tant qu’école privée, nous ne pouvons pas subventionner les étudiants qui n’auraient pas les moyens de venir chez nous. Ceci dit, les tarifs sont raisonnables par rapport à ce que les étudiants japonais, américains ou anglais ont l’habitude de payer. D'autre part, de nombreux élèves contractent des prêts étudiants, ce sont souvent des étudiants très motivés. Quelle est la valeur et le degré de reconnaissance du diplôme ? Au bout de 4 ans d’étude, l'étudiant obtient un Bachelor (Hons) in Fashion. C’est un diplôme universitaire britannique reconnu internationalement. Pour moi, ce séjour en Angleterre est primordial. Y a t-il une alternative à cette dernière année en Angleterre ? Oui. Le problème, en Angleterre, est que les frais de scolarité sont, pour les étudiants non européens, très élevés. Il y a deux vitesses là-bas : des tarifs raisonnables pour les européens et des tarifs astronomiques, comparables aux prix des universités américaines, pour les non européens. Beaucoup de ces élèves n’ont pas les moyens de faire cette 4ème année en Angleterre. De plus, la vie là-bas est très chère. Pour ces étudiants, nous avons parallèlement mis en place un système très différent, orienté vers toute l’Europe. Cette nouvelle formule sera étrennée en octobre prochain. Nous avons élaboré avec l’université de Perpignan un programme orienté sur la mode et le luxe en général. Cette formation consiste à faire une quatrième année de stages dans une entreprise du secteur dans une ville européenne (Paris, Milan, Bruxelles…). Les étudiants passent trois semaines en stage et le reste du mois, dans une université européenne différente à chaque fois (Espagne, Italie, Belgique, Angleterre, France…). Ils y suivent des séminaires spécifiques sur l’économie et l’industrie de la mode et du luxe dans le pays où ils se trouvent. Ils visitent également des entreprises locales. A la fin de l’année, ils auront acquis une expérience européenne assez fantastique et recevront un diplôme universitaire équivalent à un bac + 4. Ce nouveau programme vise principalement les non européens mais sera bien sûr ouvert aux ressortissants de la communauté européenne. Quel est le taux d’intégration professionnel en fin de cursus ? Nous privilégions l’insertion internationale. Pour cette raison, la majorité de nos étudiants poursuivent leurs études à la fin du cursus grâce aux partenariats que nous avons mis en place. De telles opportunités sont rares pour des étudiants français. Ils garantissent ainsi leurs capacités de placement et d’adaptation pour l’avenir. Je n’ai pas de chiffre exacte mais je peux vous dire en revanche, que la doyenne du London College of Fashion m’a dit il y a trois jours : «Vos étudiants sont tous excellents». Cela m’a fait très plaisir de la part d’un collège qui est réputé internationalement pour la qualité de son enseignement. J’étais très fier de mes élèves. Aidez-vous les élèves à entrer dans la vie active ? Nous avons la chance d’avoir d’excellentes relations avec de nombreuses entreprises du secteur de la mode. Le comité pédagogique est composé de personnalités qui occupent des fonctions importantes dans des grandes sociétés (Martin Margiela, Sonia Rykiel, Dior, Gucci…). Ces personnes qui, bénévolement, acceptent de s’intéresser au développement de l’école, nous aident à trouver des stages pour les étudiants. De manière générale, l’école a beaucoup de relations dans ce domaine. Ceci dit, j’insiste sur le fait que ce n’est pas à nous de trouver les stages et les postes. Nous aidons nos étudiants, ils suivent de façon hebdomadaire des cours de «Permanence Recherche Stage & Emploi», nous pouvons éventuellement passer un coup de téléphone pour ouvrir une porte mais nous souhaitons leur enseigner l'autonomie. C’est à eux de se débrouiller pour trouver les stages et les jobs. Pourquoi y a t-il une majorité de filles dans ces professions alors que la plupart des grands couturiers sont des hommes ? Malheureusement, il y a encore une espèce d’à priori qui porte à croire que la mode est un métier exclusivement féminin. C’est contraire à la réalité, car si vous entrez dans un groupe comme LVMH, il y a beaucoup d’hommes. Il est évident néanmoins que c’est une industrie dans laquelle les femmes sont plus présentes qu’ailleurs et c’est très bien comme ça! Pourquoi ce sont les hommes qui sont connus ? Je n’en sais rien. C’est vrai également dans les autres disciplines. Il y a plus d’hommes peintres, sculpteurs, écrivains, compositeurs… Probablement parce que pendant des siècles, les femmes ont été cantonnées à certaines tâches et les hommes à d’autres. Nous sommes seulement en train d’en sortir. Nous voudrions que cela aille très vite mais les mentalités ne changent pas en 2 générations ! Propos recueillis par Benoîte Taffin

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